BURKINA FASO – INTRODUCTION

Recherches et écriture: LEPAC / Jean-Christophe Victor
Réalisation : Jean-Loïc Portron
Graphisme : Pierre-Jean Canac

Diffusion sur Arte à 27.12.2003 22:30
Diffusion sur TV5 à 11h25 : 10.01.2004 11:50

 

Le Burkina Faso est un petit Etat situé entre désert du Sahara et forêt équatoriale africaine. Le pays est enclavé, régulièrement soumis aux sécheresses, il subit de plein fouet la crise en Côte d'Ivoire voisine, tout comme la concurrence des producteurs de coton américains subventionnés, empêchant les producteurs burkinabés d'exporter leur propre production de coton. Jean-christophe Victor a passé trois semaines au Burkina Faso pour tenter de comprendre, comment un pays peut surmonter de tels handicaps.

 

 

 

 

BURKINA FASO - CARTOGRAPHIE

Date de Tournage : 20.11.2003

Aujourd’hui, je vais vous parler de l'un des pays les plus pauvres au monde, un pays enclavé, qui subit les conséquences de la crise en Côte d'Ivoire. Au cours d'un séjour au Burkina-Faso à l'automne 2003, j'ai donc essayé de comprendre ce qui fabrique - et maintient - la pauvreté. On peut peut-être repérer 4 ou 5 handicaps fondamentaux.

 

 

Situation géographique du Burkina-Faso


Le Burkina-Faso est un pays du Sahel, situé entre le Sahara et l’Afrique noire.
Le pays s'inscrit dans la boucle du Niger.
C'est un pays où vivent de très nombreuses ethnies, et la première à s'être organisée en société politique est celle des Mossis.

 

Les royaumes Mossi


Les premiers royaumes Mossi datent du XVIème siècle et ils vivront jusqu'au 19ème sous la conduite d'un empereur appelé Moro Naba.
Ces empereurs sont vénérés par le peuple Mossi comme des dieux, ils règnent sur un territoire qui n'a pas de forme étatique précise.

 

Les débuts de la colonisation française


On a peu de sources écrites sur les royaumes Mossi, mais lorsque au XIXème siècle, les militaires français entrent en pays Mossi, ils rencontrent une société hiérarchisée à forte tradition de commerce caravanier à travers le Sahara, autour d'un centre d'échanges, le marché de Bobo-Dioulasso, et les transactions nord-sud portent sur l'or, les étoffes, le sel, le kola.
C'est donc avec un empereur Mossi que la France négocie la signature d'un traité de protectorat en 1895, la présence coloniale proprement dite étant imposée militairement à partir de 1919 malgré de très fortes résistances des populations.

 

La formation de la Haute-Volta


La
France forme alors une colonie qui va s'appeler la Haute-Volta. Cette colonie est un casse-tête pour les cartographes, car elle disparaît et réapparaît plusieurs fois.

 

Les découpages coloniaux


La colonie de Haute Volta est d’abord « Territoire militaire » de 1896 à 1904, puis intégrée à la colonie du Haut Sénégal-Niger jusqu'en 1919.
Elle est alors supprimée pour être partagée administrativement en 1932 entre le Niger, le Soudan français - c'est-à-dire le Mali - et une région riche au sud qui se nomme « la Côte de l'Ivoire ».

 

Des frontières, fonction des besoins économiques


Les adaptations administratives ont aussi des mobiles économiques.
Les populations de la Haute-Volta, les Mossis, les Dioulas émigrent massivement vers cette Côte de l’Ivoire.
On oriente les populations en fonction du développement, et des besoins de main d'œuvre.

 

L’indépendance


La Haute-Volta devient indépendante en 1960 mais aujourd'hui elle n'existe plus.
Car en 1984, après le coup d'Etat d'un jeune officier, Thomas Sankara, la Haute-Volta est renommée Burkina-Faso, c.à.d. la « Patrie des hommes intègres » dans la langue des Mossis.

 

La répartition ethniques


Plus de 60 ethnies vivent au Burkina. Ces ethnies n'occupent pas toujours des aires géographiques fixes, les limites entre les peuples ne sont pas nettes, des migrants vont vers les villes, il y a des ethnies plus commerçantes que d'autres.
De manière générale, on a :
- au centre, les Mossis, les héritiers de l'empire. Ils forment à peu près la moitié de la population burkinabé ;
- au Nord, les populations du Sahel, telles que les Peuls, ils forment à peu près 8 % ;
- à l'Ouest, les Bobo, le groupe le plus anciennement installé, avec les Sénoufo ;
- à l'Est, les Gourmantché ;
- au Sud-Ouest, les populations du Mouhoun, l'ancien fleuve Volta noire, notamment les Lobi.

 

Les religions

Les burkinakés pratiquent trois religions en bonne intelligence:
-les musulmans sont plutôt au nord. Ils seraient 40% en l’an 2000
-les chrétiens, surtout catholiques, sont autour de 15 % aujourd’hui.
Mais tout le monde est animiste.

La population


Le Burkina-faso compte 13 millions habitants en 2004.
Il a l'un des taux de fécondité les plus élevés de toute l'Afrique de l'Ouest ; et il a l'un des taux de mortalité les plus élevés, en augmentation depuis 10ans à cause du sida.
Au Burkina-Faso, l'espérance de vie est de 47 ans en moyenne en 2001 alors que pour l’Allemagne et la France, elle est de plus de 78 ans.

 

L’urbanisation croissante


Le Burkina-Faso est un pays très rural, mais les gens viennent de plus en plus dans les villes : Ouagadougou, la capitale, et Bobo-Dioulasso. Le graphique indique bien la progression de l'urbanisation à partir des années 1970 à Ougadougou.
Ce phénomène d'urbanisation a d'énormes conséquences au niveau de l’approvisionnement en eau, du développement de bidonvilles, et destructuration des sociétés traditionnelles, entraînant l’arrêt de la transmission des savoirs oraux.

 

Premier handicap : la déforestation


Le pays fait 274 000 km2, avec :
- au Nord, la zone sahélienne qui couvre à peu près 25% de la superficie du pays,
- la zone intermédiaire dite de savane, avec une courte saison des pluies,
- et au Sud, la zone tropicale humide, avec une savane boisée où l'on constate d’ailleurs un gros effort de reboisement depuis 1995 à cause de la désertification.
C'est le premier handicap du Burkina-Faso et la principale cause est l’homme à travers :
- des feux de brousse volontaires pour l'agriculture sur brûlis,
- le bois utilisé pour la cuisine,
- le surpâturage,
- et les sécheresses successives depuis les années 1970 .

 

L’agriculture


Le Burkina-Faso est un pays très agricole avec au centre et Nord-Est, sorgho, mil, arachide, riz,
Si l'on suit maintenant les courbes de pluviométrie et les réseaux de fleuves, on repère les cultures maraîchères et rizicoles et au Sud-Ouest (en jaune sur la carte), du coton (en blanc sur la carte ) et du maïs.

 

Les ressources minières


Au Burkina, il y a quelques mines d'or. C'est le 3è produit d'exportation, mais il en existe d’autres tels que le phosphate, le marbre, le manganèse, le cuivre et le fer, mais tout reste à faire dans le domaine minier.
En revanche, le coton reste le premier produit d'exportation du pays.

 

L’handicap du coton


La vente du coton représente 50% des devises du Burkina, il fait vivre 20 % de la population du pays, par conséquent le coton est le principal moyen de réduire le déficit chronique de la balance commerciale.
Mais, les facteurs favorisant son exportation, et les rentrées de devises sont soumises à plusieurs aléas très contraignants :
- les pluies qui sont irrégulières;
- les variations des cours mondiaux,
- la concurrence mondiale qui ne respecte pas le jeu du libre marché, puisque les producteurs américains du "coton belt " sont subventionnés par l'Etat fédéral. D'où le blocage à l'OMC, à Cancun.
Donc, la dépendance de l'économie du Burkina à un seul produit créer un handicap de plus.

 

L’enclavement, troisième handicap


L’enclavement du Burkina forme un troisième handicap, le pays a six voisins :
le Mali,
le Niger,
le Bénin ,
le Togo,
le Ghana,
et la Côte d'Ivoire.

 

Les conséquences de la crise ivoirienne


Le principal axe routier nord-est / sud-ouest et la ligne de chemin de fer, qui va de la capitale Ouagadougou en passant par BoBo-Dioulasso, puis jusqu'à Abidjan, sont les seules lignes de vie du Burkina-Faso puisque qu’ils permettent les exportations vers le Golfe de Guinée.
Or, avec la crise en Côte-d'Ivoire, la ligne de chemin de fer a été longtemps fermée.
Des voies de contournements ont été trouvées via le Ghana et le Bénin par la route, mais c'est plus lent et c'est plus cher.

 

L’exode des Burkinabés de Côte d’Ivoire


A la crise ivoirienne s’aditione le legs des découpages coloniaux.
Près de deux millions de Burkinabés ont émigré depuis le milieu du XXè siècle vers la Côte d’Ivoire pour répondre à la demande de main d'œuvre.
Mais avec la crise politique, identitaire, et l'insécurité qui règne maintenant en Côte d'Ivoire, plusieurs centaines de milliers de Burkinabé ont préféré fuir, depuis 2001, ne pouvant plus se sentir "chez eux" dans ce pays où ils vivaient pourtant depuis des décennies.

 

BURKINA FASO – CONCLUSION

Date de Tournage : 20.11.2003

Alors, résumons les handicaps :
- la désertification qui est surtout due aux hommes, or elle dégrade cette économie qui est très agricole
- des exportations qui sont soumises aux prix du marché mondial, alors que la concurrence est faussée par les subventions américaines aux producteurs de coton. On se demande d’ailleurs à quoi sert l'OMC...
- l’énergie est chère dans ce pays,
- le pays est enclavé
- et la crise en Côte d'Ivoire est un gros problème désormais pour le Burkina.
- On peut ajouter aussi - le poids de la dette,
la scolarisation et la formation qui est insuffisante ; et puis les détournements.
Voilà, on le comprend, c'est difficile pour ce pays et pourtant il est peuplé de gens pleins de dynamisme, lassés que l'on donne toujours une image négative de leur pays, et impatients que cela change, je vous rappelle que c’est un pays sans tension inter - ethnique, ni tension interreligieuses.
Est-ce que c’est le manque d'alternance politique, la corruption, Est-ce que c’est là le 4éme handicap de ce pays ?
Mais, pourtant Burkina-Faso en Mossi, cela veut dire « la patrie des hommes intègres » ?